La forme, le nombre et la couleur

Former une oeuvre sur les traces des avant-gardistes relève de la contorsion à moins que la quête rédemptrice contenue dans la dérive politique ou a-politique adoptée par ceux-ci incite aujourd'hui à utiliser les moyens mis à notre disposition par la téchnique pour revisiter les carcasses laissées sur le champ de bataille idéologique de l'art du XXème siècle et réanimer les formes suprématistes abandonnées dans l'espace comme de nombreux vaisseaux sans commande.

Je m'explique: les pionniers qui ont défriché l'espace du tableau durant l'aventure moderne sont aujourd'hui disparus, il nous appartient de stopper la politique de la terre brulée, rendre le champ de la création à l'interactivité et pervertir la sacro-sainte icône du gène de l'altérité. Le carré fédérateur du modernisme n'a plus à bien se tenir, son espace vital est celui de la respiration et de la dilatation du monde. Ce monde qui se tient là les deux mains dans l'objet-tableau et lui donne enfin sa justification. Monochrome, matière, minimalisme, suprématisme sont les ingrédients laissés par les voyageurs de l'infini qui se sont intuitivement lancés dans l'espace du tableau, le festin auquel nous convie le troisième millénaire fera appel à ces épices rares, il faut les utiliser comme la matière précieuse qui relie les êtres dans leur incapacité à se comprendre. Le signe de cette rencontre est toujours celui dont jouit l'œil à l'affut de sa propre surprise, déconcertés que nous sommes tous par l'affront fait à la monoculture de l'image celui-ci ne résidant pas dans la variété mais dans la distortion et la dilatation, comme si la raison s'était abandonnée à la réalité subversive.

Subversion, perversion... et si l'obscénité était l'aboutissement de la réalité qui se gorge du mal qu'elle contient pour faire pression sur l'idéal contenu dans l'œuvre d'art... enfin une immense partouze abstraite accrochée aux cimaises.

Peinture je t'aime et je te respecte, chassis, toile je vous adore et par dessus tout je veux votre bonheur c'est pourquoi je vous remets entre les mains du sort et de la subjectivité !

Quilio